Cinéma #1 | Premier contact - Quand la science-fiction prend tout son sens

jeudi 9 février 2017



Samedi soir, le nez enfoui dans mon écharpe, l'envie de voir un film en grand, je me suis laissée convaincre par le film Premier Contact. Cela faisait très longtemps que je n'étais pas allée voir un film de science-fiction au cinéma, le genre n'étant pas celui que je préfère de manière générale. Et puis ces dernières années, une majorité des films de science-fiction centrés sur le thème de l'invasion extraterrestre n'ont malheureusement pas fait dans la subtilité et ont, pour ma part, beaucoup sacrifié le fond au profit d'une forme assez excessive et surtout trop générique. 

Premier contact vient de me réconcilier avec le genre. Profondeur et éblouissement, infiniment grand et infiniment intime, les yeux qui brillent et le cœur qui enfle et enfle. Un très beau film. Je vous en parle aujourd'hui... 

RESUME 

Lorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks afin de tenter de comprendre leurs intentions. 

Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain




Je dois dire qu'en entrant dans la salle, après lecture du synopsis, je ne m'attendais à rien de particulier, je sentais le scénario venir, je me préparais aux scènes d'action musclées. Finalement, je me suis retrouvée saisie sur mon siège, par la beauté esthétique du film, par le jeu d'Amy Adams et surtout par l'intelligence du scénario, sa sensibilité et la volonté évidente du réalisateur de transcender le genre. 

Ce qui frappe dès les premières secondes, je vous le disais, c'est l'esthétique, la beauté des scènes, des couleurs. Le soin apporté à l'atmosphère. C'est un film d'action mais c'est surtout un film d'ambiance où tout passe par la tension, le flottement. Par un suspens pur et sans artifice qui tient tout entier à la capacité de l'héroïne de traduire en un temps réduit ce que cherche à leur dire les extraterrestres. Il s'agit d'une action dépouillée, sans violence, une action purement intellectuelle. Et c'est passionnant. 


Le pouvoir de la langue sur les idées
On entre dans le monde de la linguistique, à un niveau largement vulgarisé bien sûr mais qui reste intéressant. Le lien entre langue et culture, comment notre langue peut façonner notre façon de penser. Comment la langue, par les choix qui la structurent, nous structure également et nous conditionne à la pensée d'une société. Comprendre d'autres langues, devient alors un moyen de s'intéresser à d'autres modes de pensées et à d'autres schémas. 

J'ai d'ailleurs fait le lien avec le livre Le silence de mon père, dont je vous parlais la semaine dernière ici. L'auteure, Doan Bui, revient en effet sur ce phénomène. Elle explique notamment comment l'absence du pronom "je" en vietnamien avait pu tendre à effacer le droit à l'individualisme au sein de se cellule familiale. 

La communication contre la peur 
Au fond, c'est donc un film sur la communication. La capacité à émettre et à recevoir. A écouter et à se faire entendre. Car si Louise Banks cherche à communiquer avec les extraterrestre, les humains cherchent également à communiquer entre eux. Les différents pays ayant reçu les 12 vaisseaux commencent par coopérer puis, au fur et à mesure que le temps passe et que les questions demeurent non résolues, la peur s'installe et les relations internationales se dégradent, jusqu'à mener le monde au bord d'une troisième guerre mondiale. 

Comment ne pas mettre ce développement en miroir avec ce que nous pouvons vivre en ce moment. Je n'ai pu m'empêcher de faire le parallèle avec la crise des migrants, en ne communiquant pas face aux changements et "aux étrangers", nous amplifions notre réflexe de peur et cela nous emmure et nous empêche de mieux chercher à connaître l'autre. 

Qu'est-ce qu'être humain ?
C'est également un film sur l'humanité, sur cette reconnaissance ultime. Les extraterrestres ont-ils une part d'humanité en eux qui ferait que l'on pourrait s'entendre et les accepter ? Il y a cette scène dans le film où les chercheurs pénètrent le vaisseau vêtus d'une combinaison orange informe qui transforme leur silhouette et les rend méconnaissables. Ils ne ressemblent alors plus à des êtres humains mais à des être oranges et biscornus, étranges et étrangers. Le face à face se fait alors entre les chercheurs et les extraterrestre et au fond, sous leurs apparences difformes, lesquels sont dotés d'une humanité ? Qu'est-ce qu'être humain ? Ne pouvons-nous pas, nous-mêmes, passer de l'autre côté de la barrière, du côté des extraterrestres, des a priori dénués d'humanité ? Quelle est la limite qui nous assure de notre humanité ? Quels en sont les contours ? Le film explore là différentes pistes au travers de différentes péripéties que je vous laisse découvrir...

La vie : un cheminement plus qu'un résultat
Il est difficile de parler d'un des thèmes essentiels de Premier contact, auquel sont consacrées les dernières très belles  minutes du film, sans dévoiler une des clés de l'énigme. Je ne veux pas vous gâcher la surprise donc je ne glisserai que quelques mots ici sur la véritable ode au choix contre la fatalité qu'esquisse le réalisateur Denis Villeneuve. Peut-on choisir une voie, tout en connaissant l'issue, sans la concevoir comme une fatalité ? Pouvons-nous croire que le cheminement compte plus que le résultat ? Que le moment présent est le cœur de tout, au-delà des projections et de l'imposant futur ? Un dilemme auquel sera confronté le personnage principal et qui m'a laissée toute chose à la fin de la séance. J'esquissais justement quelques éléments de réflexion ici la semaine dernière sur ce questionnement choix/résultat qui me semble central dans la vie. 

Pour finir, je ne peux que revenir sur l'ingéniosité du scénario qui fait basculer d'un coup d'un seul l'énigme. Un coup de théâtre assez habilement amené qui modifie également notre compréhension du personnage de Louise Banks. Je ne l'avais personnellement pas du tout vu venir et il faut dire que c'est assez grisant de se faire autant prendre au dépourvu en tant que spectateur. Cette nouvelle vision de la linguiste est ensuite poétiquement explorée sur les dernières minutes du film qui finissent de donner au personnage toute sa couleur et sa complexité.  
Certaines critiques négatives pourraient cependant être faites au film. Notamment sur la clé finale de l'énigme qui n'est pas donnée. On ne saura finalement que bien partiellement la raison de la venue de ces extraterrestres sur Terre. 

J'ai également trouvé certaines ellipses trop importantes, notamment concernant la construction du processus linguistique menant à l'éventuelle compréhension de leur langue. 

Enfin, on peut regretter que Denis Villeneuve ait fait le choix de sous-exploiter certains personnages secondaires pour ne laisser la part belle qu'à Louise Banks, incarnée par la très douée Amy Adams. C'est un choix qui se respecte, qui laisse planer un peu de mystère mais qui se révèle également frustrant, semblant amputer le film de certains potentiels. 
Je finis ici cette critique, en espérant qu'elle vous aura donnée envie de découvrir ce film. Je ne peux qu'ardemment vous inviter à le retrouver en salle. Un film qui par le prisme de la science-fiction nous fait réfléchir sur notre humanité et le sens que l'on veut lui donner. 

Avez-vous pu voir ce film ? Qu'en avez-vous pensé ?
Et quelles sont vos attentes en générale vis à vis de la science-fiction ?

Le film est sorti le 7 décembre mais il est encore à l'affiche de certains cinémas, profitez-en. 
Images : Copyright 2016 Sony Pictures Releasing GmbH


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